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Comment la résilience affecte le rétablissement?

Comment la résilience affecte le rétablissement

Nos deux protagonistes (noms fictifs) ont subi un accident de voiture occasionnant de multiples fractures et contusions, ainsi que des entorses cervicales et dorsales. Le premier, monsieur Lopez démontrera comment certains facteurs personnels et attitudes affectent négativement la capacité de résilience. La seconde, madame Tounkara, fera preuve de résilience malgré les difficultés et son processus de rétablissement sera très différent de celui de monsieur Lopez. À vous d’essayer d’identifier les différences entre leurs deux expériences personnelles…

Monsieur Lopez, 30, célibataire, est mécanicien. Il habite avec son père âgé. Lors des 6 premières semaines de convalescence, monsieur est très stressé, il fait des cauchemars en lien avec l’accident, n’arrive pas à dormir la nuit à cause des douleurs, et dort beaucoup le jour. Il ne veut pas déranger son père, qui est âgé, pour lui demander de l’aide pour se déplacer dans la maison. Il connaît peu de gens de l’extérieur pour venir l’aider. Il commande de la nourriture « fast food » et mange à des heures irrégulières. Il est très inquiet et a peur de bouger car cela augmente ses douleurs. À chaque fois qu’il parle de son accident, il parle de l’injustice qu’il vit, et de la conductrice ivre qui a causé l’accident. Il regarde les photos de sa voiture accidentée, et ressent beaucoup de colère. Les semaines passent et monsieur débute les suivis en physiothérapie. Il est insatisfait des services, il trouve qu’ils ne sont pas assez fréquents et que ça n’avance pas assez vite. Il ne fait pas les exercices recommandés à la maison car ils augmentent la douleur. Monsieur prend des médicaments de type narcotiques qui ne font plus effet selon lui. Le médecin ne souhaite pas augmenter la dose et lui dit de bouger davantage. Monsieur se sent incompris, et croit qu’il y a quelque chose de grave qui n’a pas été diagnostiqué, sinon pourquoi aurait-il encore si mal! 

Après 6 mois, monsieur est complètement isolé. Il ne veut pas parler à ses collègues de travail car il se sent lourd et ne veut pas les déranger. Il est complètement découragé et a très peur de ne plus être capable de retourner au travail. Il se dit des choses comme : « Je ne sais rien faire d’autre, je vais avoir besoin d’argent, mon travail est exigeant physiquement, et j’ai de la misère à me lever de ma chaise! ».  Il dort toute la journée et passe la nuit sur son téléphone à regarder les réseaux sociaux. Il n’a aucune motivation, n’a envie de rien et se sent triste. Son médecin lui propose un service en psychologie, mais monsieur est sceptique : « Je n’invente pas la douleur, ce n’est pas dans ma tête le problème! ».  En clinique de première ligne, il n’y a plus d’amélioration et monsieur ne collabore pas très bien. Il est recommandé que monsieur bénéficie d’un suivi en 2e ligne chez Impact Réadaptation. 

 

Madame Tounkara, 42 ans, mère de 3 enfants, est infirmière auxiliaire en CHSLD. Elle habite avec son mari très aidant, mais a également la chance d’avoir une sœur et une mère très présentes. Lors des 6 premières semaines de convalescence, madame Tounkara n’a besoin de se préoccuper que de son rétablissement. Les enfants sont pris en charge par son entourage, elle mange bien et se repose tant que possible. Comme madame Tounkara est infirmière, elle comprend la plupart des termes médicaux, sait quelles questions poser et à qui les poser. Elle sait qu’elle a eu beaucoup de chance et que les premiers temps de sa réadaptation sont essentiels pour son rétablissement. Elle débute les suivis en physiothérapie 3 fois par semaine dès que les fractures sont guéries. Toutefois, à la maison, madame a déjà repris certaines tâches significatives pour elle, même si elles lui exigent plus d’énergie comme aider aux devoirs de ses enfants et plier le linge du lavage. Le reste du temps, madame prenait le temps de parler à des amis qui la distraient, de regarder des émissions de télévision qui la font sourire, et a même repris le tricot. À cause de la médication et des douleurs au cou qui occasionnent des maux de tête, elle doit prendre beaucoup de pauses, mais elle accepte de le faire et de s’écouter car à quoi bon se fatiguer davantage! Parfois la peur d’avoir des séquelles et de ne plus pouvoir reprendre son travail la hante. Elle en parle à son mari dans ce temps-là, qui a une bonne écoute et qui lui apporte un certain réconfort dont elle a besoin : « C’est normal que tu as peur, c’est gros ce que tu as vécu, mais peu importe le résultat, je serais là avec toi! ». Parfois, la nuit, madame Tounkara a de la difficulté à dormir, elle fait des cauchemars et se réveille en sueur et anxieuse. Elle en parle à son médecin et celui-ci lui propose une médication mais aussi un suivi en psychologie. Elle accepte. Ceci l’aide à mieux dormir et à adresser certains aspects traumatiques de son accident. Ouff, enfin elle peut dire ce qu’elle n’ose pas dire à son mari : elle est parfois découragée, se sent étourdie par ses enfants, et de moins en moins motivée à se lever, car à quoi bon! Son humeur est dépressive car en effet, la douleur et le stress aigu lié au trauma commence à peser. 

Leur parcours chez Impact Réadaptation…

Monsieur Lopez : À l’évaluation interdisciplinaire, il est évident que monsieur est déconditionné. Il a pris du poids, a perdu en force et en mobilité dans l’ensemble de son corps. Il a une pauvre hygiène de vie, et connaît très peu de stratégies efficaces de gestion de la douleur. Il a peu d’endurance à l’effort, boitte et rapporte un niveau de douleur très élevé, même au repos. Un programme de développement des capacités fonctionnelles est recommandé : monsieur doit se présenter tous les jours en clinique pendant 3 à 5 heures. On enseigne et éduque monsieur sur sa condition, des programmes d’entraînement en kinésiologie et d’activités thérapeutiques en ergothérapie sont offerts. Monsieur est très stressé, rapporte une augmentation de la douleur dès les premiers jours en clinique et commence à s’absenter. On lui explique que cela est normal et qu’il doit venir pour qu’on puisse l’aider à mieux gérer la douleur. Monsieur bénéficiera également d’un suivi en psychologie. En clinique, il rencontrera des gens qui comme lui traversent une période difficile. Graduellement, il va vivre des succès, et après 2 mois, un plan de retour au travail aura été élaboré. Monsieur Lopez est stressé, mais le travail lui manque et il ne sera pas seul dans son retour! L’ergothérapeute a prévu de venir faire un coaching en milieu de travail pour vérifier si certaines tâches doivent être modifiées pour l’instant et comment améliorer l’hygiène posturale pour mieux gérer les douleurs. 

Madame Tounkara : Un suivi interdisciplinaire chez Impact Réadaptation est offert en ergothérapie, kinésiologie et en physiothérapie, et madame doit se présenter 3 fois par semaine pendant 3 heures en clinique.  Madame est légèrement déconditionnée, mais a maintenu de belles forces, adopte de bonnes stratégies de gestion du stress et de douleurs. Elle bénéficie d’une facilité à lâcher prise sur ce qu’elle ne peut contrôler. Elle se concentre sur les améliorations en réadaptation et sur ses forces, et rebondit pour mettre les bouchées doubles sur son rétablissement. En étant à l’écoute de ses douleurs, elle peut en faire un peu plus tous les jours. 

Madame Tounkara reprend le travail progressivement quelques semaines plus tard. Elle fait preuve d’une compréhension encore plus grande des symptômes douloureux de ses patients et ses collègues, elle est d’une sensibilité et d’une compassion dédoublée. Elle est même capable de se considérer reconnaissante face à l’épreuve qu’elle a vécue : Son couple en ressort grandit et plus soudé, elle aura pris ce temps d’arrêt non demandé pour renforcer ses liens avec sa famille et aura appris une belle leçon de persévérance à ses enfants qui ne prendront plus pour acquis tous les efforts que leur maman met pour passer du temps de qualité avec eux. 

Si madame Tounkara pouvait choisir, elle n’aurait pas choisi d’avoir cet accident. Par contre, certains outils ont permis à madame d’être plus résiliente et d’atteindre ce qu’on appelle une croissance post-traumatique : 

  • Des facteurs de protection psychologiques comme avoir une famille présente, un soutien professionnel, des connaissances sur sa condition;
  • Elle adopte une attitude qui nourrit la résilience, soit en mettant un focus sur ses valeurs et en orientant ses actions en ce sens, ainsi que sur ses forces plutôt que ses difficultés; 
  • Sa capacité à faire preuve d’auto-compassion et à lâcher prise sur ce qu’elle ne peut changer;
  • Sa capacité à faire confiance aux processus de réadaptation et aux professionnels de la santé sur son chemin.

Les histoires de monsieur Lopez et de madame Tounkara sont très différentes. Pour la même condition, le même accident, on retrouve des résultats très différents. Ceci est à prendre en considération dans le pronostic de rétablissement et dans le type de services qu’une personne nécessite. Chez Impact Réadaptation nous sommes capables d’identifier et d’évaluer ce qui peut favoriser le rétablissement le plus optimale. Notre expertise nous permet d’identifier avec réalisme, sensibilité et empathie les facteurs qui favorisent le pronostic de réadaptation mais aussi d’ajuster notre offre de services en fonction de ces facteurs. Nous sommes tous capable de faire preuve de résilience, mais certains ont besoin d’un coup de pouce pour le réaliser!

Marly Pinto
Ergothérapeute